mardi, 15 avril 2014
De retour des Terres de St Hilaire (1ère partie): l'agriculture raisonnée, pratique durable?
Les Terres de Saint-Hilaire est un domaine viticole situé à une quarantaine de kilomètres d'Aix-en-Provence avec deux particularités: se vouloir plus respectueux de l'environnement et accueillir un Living Labs pour tester, notamment, des innovations technologiques dans les énergies renouvelables. J'ai visité ce lieu récemment avec Isabelle Guitton-Bernet, avocate et directrice d'Ecolex formation. Dans cette première partie, je laisse ma blogueuse invitée vous livrer ses impressions sur les pratiques viticoles du domaine. J'aborderai le Living labs la semaine prochaine.
« Se ressourcer, savourer, respirer… » est la devise de Sophie, son frère Philippe et Pierre Burel, père visionnaire, qui lègue cet immense domaine viticole en Provence s’étendant sur 1550 hectares de forêt, vergers et vignes. Le domaine propose également des logements (gites et chambres d’hôte), des espaces de réception, ainsi qu’un centre équestre, où les chevaux sont en semi-liberté.
Les cépages du domaine
Les vins des Terres de Saint-Hilaire (rouges, blancs et bien évidemment rosés) sont produits sur plus de 100 hectares de vignes. Après avoir beaucoup arraché de cabernet-sauvignon (rouge), peu utilisé dans l’appellation d’origine contrôlée Coteaux Varois en Provence dont fait partie le domaine, Philippe Burel et le maître de chai, Jean-Philippe Manzoni, ont fait le choix de replanter des cépages variés et exigeants : grenache, syrah, cinsault, carignan, mais aussi rolle et clairette, plus atypiques. Leurs objectifs : produire principalement du rosé et équilibrer les cépages en recherchant les parcelles les plus adaptées. En accord avec leurs objectifs, ils se sont inscrits dans une démarche "raisonnée".
Qu’est-ce que l’agriculture raisonnée ?
En France, l’agriculture raisonnée a son décret depuis 2002 qui nous livre la définition suivante : « Les modes de production raisonnés en agriculture consistent en la mise en œuvre, par l'exploitant agricole sur l'ensemble de son exploitation dans une approche globale de celle-ci, de moyens techniques et de pratiques agricoles conformes aux exigences du référentiel de l'agriculture raisonnée » (1).
Le référentiel en question comporte plus d’une centaine d’exigences nationales telles que:
- réaliser des analyses de sol
- assurer une diversité des cultures sur la superficie agricole utile de l'exploitation
- réaliser des observations sur l’état sanitaire des cultures, dans des parcelles représentatives de l’exploitation (contrôles visuels, piégeages…) en préalable à d’éventuels traitements.
Sur le domaine viticole, cela consiste notamment à compter les vers de la grappe pour éviter de réaliser un traitement insecticide non justifié.
Contrairement à l'agriculture biologique, l'agriculture raisonnée utilise les mêmes techniques et les mêmes produits que l'agriculture conventionnelle, y compris les produits chimiques de synthèse. Mais uniquement si cela s'avère nécessaire (2).
Un mode de culture qui ne fait pas l’unanimité
La critique récurrente de ce mode de culture est que le référentiel manquerait de rigueur et de précision : il serait trop général. La majorité des exigences du référentiel ne sont en effet qu’un rappel pur et simple de la loi.
Si le choix de l’agriculture raisonnée est fait par l'exploitant pour des raisons commerciales, de communication ou de contrôle des coûts, la protection de l’environnement ne sera évidemment qu’un prétexte et ce choix aura au final des effets limités pour la sauvegarde de la biodiversité. En revanche, si ce référentiel est appliqué par un agriculteur qui résonne "respect de la nature et du vivant", cet objectif sera atteint.
De ce fait, la seule certification "agriculture raisonnée" ne suffit pas. Il est fondamental pour l’amateur de vin soucieux de la protection de l’environnement et de sa santé, de connaître le viticulteur et la propriété. En clair: allez déguster ! Au-delà de la vérification indispensable de la qualité du vin, ce sera l’occasion de dialoguer avec le vigneron et de l’interroger sur ses motivations et sa vision par rapport à cette démarche environnementale.
Une démarche éco-responsable
L’accueil au domaine de Saint-Hilaire est chaleureux et Philippe Burel aime ses terres. Son exploitation est certifiée par le label Terra Vitis reconnu par le Ministère de l’agriculture comme étant une démarche bénéficiant de la certification environnementale (3).
Il fait un usage modéré des traitements chimiques. Il sélectionne les produits les moins dangereux pour la biodiversité et ne recourt avant la récolte qu'à des traitements biologiques. Son vin est analysé tous les ans et notre vigneron affirme qu'il ne présente aucune trace de pesticides. L'homme est curieux et entreprenant, il souhaiterait à terme s’initier à la biodynamie et à la permaculture. On le prend au mot, son vin est bon, nous reviendrons !
Cliquez pour en savoir plus sur la démarche durable du domaine.
Auteur: Isabelle GUITTON-BERNET
Crédit photo: Angélie BARAL
--
(1) Décret n°2002-631 du 25 avril 2002 relatif à la qualification des exploitations agricoles au titre de l'agriculture raisonnée; Les exploitations sont auditées par des organismes certificateurs agréés par arrêté ministériel qui sont aujourd’hui au nombre de 14 (accédez à la liste et coordonnées).
(2)Pour aller plus loin, lire "L'agriculture raisonnée souhaite convaincre et être reconnue", Actu-Environnement (13/01/06)
(3) Conformément à l’article D617-3 du Code rural
Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : agriculture raisonnée, vignoble, vin, pesticide, agriculture biologique | Facebook | |
jeudi, 26 janvier 2012
Les bananes au chlordécone: quand l'Etat "déconne"
Le jeu de mot était facile, mais il illustre surtout la réalité du scandale des bananes antillaises noyées 20 ans de trop d'un pesticide: la chlordécone. Le véritable responsable est notre Etat laxiste, année après année et tout bord politique confondu - ne l'oublions pas en ces temps d'élections. Soupçonné dès les années 60 d'être dangereux pour la santé (avec un risque accru du cancer de la prostate), les Etats-Unis ont retiré ce pesticide dès 1977. Mais il faudra attendre... 1993 pour que la France en fasse de même.
Ce scandale n'a véritablement émergé qu'au début des années 2000, quand des campagnes de mesure ont montré des taux inouïs de contamination des sols (jusqu'à 100 000 fois les normes admises pour l’eau) et une accumulation dans les végétaux, la chair des poissons, les graisses animales ou encore les produits laitiers.
Or, la durée de vie de la chlordécone est longue: suivant le contexte environnemental, plusieurs dizaines d’années sont nécessaires à l'élimination de la moitié du produit, soit 60 à 700 ans pour une dépollution naturelle des sols.
Pour en savoir plus, je vous invite vivement à lire l'article d'un médecin, Borée de son pseudo (qui édite le blog éponyme à mettre en favori!) : "Sinistres Tropiques". Mais avant.... j'attire votre attention sur la morale additionnelle du jour: si la toxicité de la chlordécone en elle-même semble modérée sur le foie, combinée à certains solvants, elle augmente leur toxicité jusqu'à... 6700 %.
Voilà pourquoi face à la plupart des industriels vous collant des produits de synthèse sous le nez (à commencer par les parfums de synthèse, les cosmétiques, etc.) en affirmant qu'aucun produit n'est dangereux, restez vigilant! En chimie, 1+1+1 est bien souvent égal à 100, ou 10.000 ou bien pire que cela. Moralité: évitez de cumuler 50 ingrédients dans un produit ou de diffuser des parfums qui se cumulent aux émanations de votre mobilier/déco...
Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : environnement, santé, chlordécone, agriculture, pesticide, banane, gouvernance | Facebook | |
mardi, 07 février 2006
Phyt’Attitude : agriculteurs, préservez votre santé !
Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : agriculture, pesticide, produits chimiques, produits toxiques, santé, alimentation | Facebook | |