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samedi, 12 décembre 2009
Grève des RER : une claque au développement durable
Je fais partie des gens coincés par l’absence de RER A. Ce type de grève où plus un train ne circule (hors heures pleines), c’est un coup de poignard au développement durable.
Du point de vue social
L’égoïsme sordide des conducteurs de RER qui n’hésitent pas à pénaliser 1 millions d’usagers et des milliers de commerçants et entreprises qui cessent de fonctionner correctement me révolte, notamment à l’heure où la Cour des comptes vient d’épingler la RATP. Ainsi, les conducteurs bénéficient d’une retraite effective à 53 ans et un salaire moyen annuel brut qui a augmenté de 18,65% (soit + 3,1% par an) entre 2001 et 2007. Qui peut en dire autant parmi vous ? Même un jeune conducteur de métro parisien gagne près de 1600 € net pour 1286h par an, soit 107h par mois (< 25 h par semaine!!!). Je connais nombre d’ingénieurs et même des doctorants qui gagnent moins à l’heure qu’un conducteur de RER...
Et qu’on ne me badine pas avec les conditions de travail difficiles, quid du ramassage des ordures, les déménageurs, techniciens des égouts, serveurs, boulangers et autres peintres en bâtiment (je ne vous dis pas ce que vous respirez…) ?
Du point de vue environnemental
Pendant ce temps, les centaines de kilomètres d’embouteillage s’accumulent avec la pollution qui va avec, les avenues sont engorgées, engendrant de surcroit des nuisances sonores et du stress. Les nombreux piétons se prennent du même coup des doses élevées de vapeurs de pots d’échappement, notamment aux alentours des grandes stations où on assiste à un ballet de navettes et bus coincés, de taxis et de voitures. Comme nous sommes en période de Noël, bon nombre de retardataires franciliens, soucieux de faire des cadeaux, les achèteront sur internet plutôt que de se déplacer en train et zou… un peu plus de trafic lié aux livraisons…
Du point de vue économique
Il n’y a pas de chiffres précis pour les coûts engendrés par la grève ramenés à une ligne de RER. Faisons 2 suppositions : un pass navigo coûtant entre 56 et 123 € par mois, prenons 100 € comme base (moyenne tarifaire pour les banlieues de petite couronne), soit 3,33 € par jour. Sur 1 millions d’usagers quotidiens, on peut supposer qu’environ 600.000 vont et viennent de banlieues et dépendent essentiellement du RER (par analogie aux taux observés des flux de transports motorisés entrant et sortant de banlieue). Cela donne un coût miminum par jour de grève sur le RER A de 2 millions d’euros.
Il faut ajouter, entre autres, le salaire des conducteurs de navettes de remplacement, l’essence, la logistique à assurer en sus et les frais de gestion post-grève pour le remboursement partiel des titres de transport, ainsi que les conséquences pour les entreprises et les commerçants, faute de clients ou de salariés absents ou très en retard. 5000 entreprises qui perdent 2000 € (soit une recette ou quelques salariés absents) engendrent 10 millions de pertes… La note finale doit donc probablement avoisiner les 15 millions d’euros (75 millions en 5 jours) pour empoisonner la vie des gens.
***
Nous sommes loin des grands combats d'antan pour l'amélioration des conditions de travail, il s'agit désormais pour les conducteurs de se battre pour conserver des privilèges au détriment des autres (ex. payer les 30 années de retraite de chaque conducteur, autant que la durée de sa vie active...). Il est injuste que des salariés qui bénéficient d’un tel positionnement par rapport à la masse des français, profitent abusivement du droit de grève en paralysant la vie de milliers d’individus. C’est éthiquement irresponsable et égoïste.
Sources
- "La Cour des comptes épingle la gestion de la RATP", Le Point (25 nov. 2009)
- "À la RATP, quel train de vie !", Bakchich info (10 déc. 2009)
- "SNCF / RATP : les coûts cachés des grèves", Ifrap (29 janv. 2008)
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Commentaires
Et hop, voilà comment un site sort de mon fil RSS après de longues années de bons et loyaux services...
Quand j'y pense, c'est rarissime que je fasse ça.
Écrit par : Le Monolecte | samedi, 12 décembre 2009
Chacun est bien évidemment libre. Mais je serais curieuse de savoir ce qui vous a choquée à ce point dans mes propos car je n'ai rien inventé dans les chiffres donnés et, compte tenu de la situation d'une majorité de français, je pense qu'il y a des moments où agir comme le font les conducteurs en ce moment est totalement déplacé.
Peut-être avez-vous d'autres données qui viennent contre-argumenter? Je suis ouverte au débat...
Écrit par : Angelie | samedi, 12 décembre 2009
Parce que l'argument écologique ne doit pas devenir un argument anti-social, parce qu'il ne reste plus beaucoup de monde qui peut encore se battre pour l'amélioration des conditions de travail. Parce que quand vous comparez vos conditions de travail et celles de ceux qui se battent, au lieu de vous dire "les salauds, ils vivent mieux que moi et en plus, ils râlent", vous devriez plutôt vous demander si lutter plus n'aurait pas été plus efficace dans votre cas. Oui, ces gars ont de meilleures conditions de vie que beaucoup d'autres salariés... mais est-ce si mirobolant, ce qu'ils ont? Ne serait-ce pas plutôt la mesure de tout ce que nous avons perdu et qu'ils arrivent à conserver, mais seulement en se battant comme des chiens?
Au lieu de vouloir que tout le monde rame vers le bas, ne serait-il pas temps de tous souquer ferme vers le haut?
Quant aux grèves qui ne se voient pas, vous savez ce qu'en pense notre gouvernement. Chaque fois que ces mecs bloquent les transports, ils vous permettent, au contraire, de bien mesurer leur poids économique et leur contribution normale et habituelle à un monde moins pollué...
Bref, ce ne sont pas les ennemis. Il ne faudrait pas se tromper de cible!
Écrit par : Le Monolecte | dimanche, 13 décembre 2009
Ce n'est pas un progrès social de devoir cotiser pour des mecs qui arrêtent de bosser à 53 ans et ont encore une espérance de vie de 30 ans en ayant eu une vie active à peine plus longue. C'est un dérèglement total du système qui pèse très lourd sur l'emploi (inutile de vous rappeler qu'un employé ne touche que la moitié de ce qu'il coûte à l'employeur, c'est dingue...) et sur les jeunes générations et celles futures. Elles n'arriveront plus dans quelques années à subvenir aux retraites parce que des types de 50 ans ont usé de chantage pour arrêter de bosser. Voilà notamment pourquoi c'est une claque au développement durable. C'est un fardeau additionnel pour les générations inadmissible.
Je vous ferais remarquer que seules la SNCF et la RATP font ce type de grève totale aussi fréquemment. Quand des médecins ou EDF se mettent en grève, on est encore soigné et on a encore de l'électricité. Voilà pourquoi je suis révoltée, quand faire grève devient une habitude pour avoir toujours plus car on sait qu'on exerce une activité qui permette de faire un chantage. C'est odieux et ça n'a rien d'équitable socialement.
Et ne vous trompez pas de combat. Si la RATP voulait vraiment améliorer ses conditions de travail, les agents feraient grève pour que des mesures soient prises pour limiter les particules fines susceptibles de les empoisonner. Là, je les soutiendrais à 300%. Mais ce n'est jamais le cas.
Je viens d'apprendre au passage qu'un de mes voisins a toutes les peines du monde pour aller voir sa soeur à l'hôpital, gravement malade, faute de RER... Il en pleurait.
Désolée, je trouve ça dégueulasse. C'est ça, le progrès social???
Non, cette grève à répétition quasi chaque année pour augmenter les privilèges de gens déjà nantis comparés à la moyenne, je ne peux pas l'accepter car ce n'est pas ça, combattre pour des valeurs sociales.
Combattre pour des vraies valeurs, c'est quand des routiers bloquent l'accès aux sites industriels (et non les routes pour ne pas embêter des citoyens qui n'y sont pour rien) parce que cela fait 2 ans qu'ils n'ont reçu aucune augmentation et que certains gagnent moins que le SMIC. Se battre, c'est quand des infirmiers touchent un salaire minable, qu'ils sont en sous-effectifs au point de ne même plus pouvoir accorder 2mn à chaque patient au risque de passer à côté d'une situation qui s'aggrave. Se battre, c'est manifester pour améliorer la sécurité de son poste de travail parce que le taux d'accidents ou de TMS (trouble musculo-squelettique) pourrait diminuer. Se battre, c'est vouloir limiter des intermédiaires ou des distributeurs finaux qui se sucrent outrageusement. Se battre, c'est pour éviter d'aller à son boulot tous les matins la peur au ventre comme certains profs en zones très difficiles qui savent que chaque jour, ça peut partir en vrille avec des jeunes prêts ensuite à les suivre pour les agresser.
Se battre, c'est pour rétablir l'équité, (re)gagner sa dignité, vivre décemment. Mais quand on abuse éhontément de sa position pour faire la pluie et le beau temps au travers d'un chantage qui touche 1 MILLION DE GENS chaque jour (vous ne semblez pas vous rendre compte de ce que cela représente...), c'est l'antithèse même de la démocratie.
Écrit par : Angelie | dimanche, 13 décembre 2009
Bon argumentaire Angelie et Le Monolecte ! Billet un peut inhabituel, mais intéressant :)
Écrit par : Avérous | mardi, 15 décembre 2009
Enfin ! vous osez écrire ce que beaucoup pensent tout bas.
Comment peut-on parler de pénibilité du travail pour expliquer les 25 heures par semaine et un départ en retraite à 53 ans ? Qu'en est-il des routiers, des chauffeurs de taxis et de ceux qui travaillent la nuit ou sur une chaîne ou dans un environnement pollué ?
Cette immobilisation est une véritable prise d'otages des travailleurs franciliens. Je suis parfaitement consciente que ce blog n'est pas destiné à ce genre de complainte mais pour faire face aux problèmes climatiques et de protection de l'environnement nous devons tous évoluer et changer nos comportements trop souvent primaires et égoïstes sans pour autant tomber dans le 'miserabilis'.
Écrit par : T. Vaneau | mercredi, 16 décembre 2009
Bravo! Enfin l'opinion public commence à réagir conter un abus des droits sociaux perpétrés par un groupe des salariés privilégiés. Bien sûr le droit de grève est sacré mais l'abus de droit est moralement et socialement condamnable. Mettre la vie quotidienne et économique des millions de travailleurs et des citoyens ( y compris des personnes handicapées et malades) en désastre est-il un moyen civilisé!! Ce n'est que de mettre ces millions des personnes et de leur vie quotidienne en otage par un petit groupe des fonctionnaires (salariés) qui contrôle les services essentiels de la vie. Un syndicalisme ressemble curieusement au terrorisme!!! Où en est le sens de civisme sociale?? Quelle solidarité les syndicats cherchent auprès des usagers en cassant la tranquillité et la sécurité des peuples qui sont en galères à cause d'une poignée de personnes?? l'assurance de services minimale existe-elle? Pourquoi les autorités sont si faibles?? Regan et Thacher avaient réussi défendre l'intérêt de la société pourquoi pas la France ?
Encore bravo pour soulever la conscience de la société.
Écrit par : Hariprosad | mercredi, 16 décembre 2009
> Hariprosad: d'accord pour la prise d'otage... mais pour ce qui est de la défense des intérêts de la société par Reagan ou Thatcher, entre le déploiement de missiles et la guerre des Malouines, j'aimerais autant éviter...
Quant à savoir pourquoi les autorités sont si faibles, c'est le résultat de trop de pouvoir concentré sur une minorité de travailleurs que sont les conducteurs sans engagement moral et contractuel d'assurer le service comme il se doit (on voit que l'histoire du service minimum ne fonctionne pas franchement!!!). On n'a jamais vu des infirmiers cesser de soigner des patients sous couvert de grève car les responsabilités que leur incombe leur profession interdit d'agir ainsi.
Quand des conducteurs régulent la vie d'un million d'usagers qui participent socialement et économiquement à tous les échelons de la société (de l'infirmier au chef de projet, du candidat à un entretien à une assistante sociale, d'un bénévole pour une ONG à l'avocat qui va défendre une cause, etc), on ne peut arrêter totalement son travail sans faire preuve d'un égoïsme sordide.
Écrit par : Angelie | mercredi, 16 décembre 2009
contrairement à Le Monolecte, ce site que je viens de découvrir va rejoindre la liste de mes flux favoris...
lorsque j'habitais encore Paris, un ami qui était conducteur à la RATP m'avait expliqué son emploi du temps par semaine: 2 jours à conduire (8 hrs/jour), 2 jours d'astreinte sur place (remplacement éventuel), et 2 jours où il devait rester joignable (avant il fallait rester chez soi, mais aujourd'hui, avec les portables...); il s'estimait lui-même privilégié, et était contre la grève, mais, comme quelques autres, il était obligé de suivre le mouvement pour ne pas être ensuite la "tête de turc" de ses collègues...
comme quoi, les victimes de ces grèves honteuses sont aussi parfois aussi au milieu des grèvistes: belle preuve de démocratie!
je voulais aussi ajouter que la grève est sans doute un droit, mais que tout le monde ne l'a pas: comment les 3 employés d'une PME pourraient-ils faire grève? comment moi-même, autoentrepreneur, pourrais-je me plaindre de ma condition? méditez celà, messieurs les grévistes de la SNCF ou de la RATP...
Je le redis, excellent article, et bravo de dire haut et fort ce que tout le monde pense tout bas quand les controleurs entre dans le wagon (d'ailleurs, ils ne viennent jamais en période de grève, bizarre); juste une chose, concernant les achats sur internet: d'un point de vue environnemental, j'ai tendance à préférer une camionnette qui va livrer 30 personnes, plutôt que ces 30 là prennent leur voiture et se tapent 3 hrs de bouchons pour acheter leurs cadeaux...
cordialement
Écrit par : David | lundi, 28 décembre 2009