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lundi, 15 septembre 2014

BILAN de la campagne #VenezVerifier de Fleury Michon

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D'avril à juillet 2014, j'ai participé en tant que blogueur à la campagne #VenezVerifier de Fleury Michon, visant à démontrer la qualité de son surimi (voir précédents articles ici et ). De la visite des usines de production en Vendée à la pêche du Colin d'Alaska et la fabrication de pains de poissons, j'ai ainsi suivi tout le processus de fabrication, allant même jusqu'à embarquer à bord d'un chalutier. Il est donc temps pour moi de faire le bilan.

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[MàJ 16/09/14]

 

Lorsque la campagne a démarré, j'ai rapidement été interpellée par l'absence d'additif et de colorant dans la recette des surimis de Fleury Michon, se démarquant ainsi d'une grande partie de la concurrence (à commencer par Coraya...). Cette bonne surprise m'a donné envie d'aller plus loin, l'occasion de se pencher sur LA question sensible : le poisson. Confronter la réalité est toutefois loin d'être évident, comme en témoigne cette vidéo que j'ai prise sur le chalutier:

 

 

Certes, le poisson pêché est labellisé MSC (Marine Stewardship Council), sensé garantir une pêche durable ne mettant pas les stocks en danger. Est-ce suffisant? Rien qu'en France, 60.000 tonnes de surimi sont consommés par an, soit 21.000 tonnes de "surimi base" (la pâte de poisson formée à partir des filets et constituant environ 35% des surimis). La marque occupant 25% de ce marché, il faut donc 5250 tonnes de surimi base (soit probablement quelques 10.000 tonnes de poissons entiers) - une bagatelle comparé à la production mondiale d'1 million de tonnes de surimi base (1).

 

Le Colin d'Alaska représente environ la moitié de la production mondiale. Mais pour Fleury Michon, il constitue 90% du poisson utilisé. C'est donc sur lui que je me concentrerai - n'ayant pu observer la pêche du Merlu blanc du Pacifique (les 10% restants). L'analyse portera donc sur les points suivants:

  1. Les garanties du label MSC
  2. Suivi des stocks et gestion halieutique
  3. Les méthodes de surveillance
  4. Les impacts sur l'environnement

 

1. Les garanties du label MSC

Le MSC est un label certifiant la pêche durable, afin de prémunir contre la surexploitation des ressources halieutiques. Né en 1997 à l'initiative du WWF et le groupe Unilever, le MSC certifie aujourd’hui 179 pêcheries dans le monde représentant 7 millions de tonnes de poissons, soit environ 7% des captures mondiales (chiffres 2012) (2).

 

Cependant, le MSC fait régulièrement l'objet de vives critiques, accusé d'être un peu trop conciliant. Une étude en 2013 (3) concluait que les principes du MSC étaient trop indulgents, en permettant une interprétation trop généreuse par les auditeurs - tout en rejetant la plupart des recours des ONG (un mécanisme faisant partie intégrante du processus, mais jamais suivi d'effet). [MàJ du 16/09/14: Le MSC a répondu à ces accusations affirmant que l'objectif de la procédure d’objection était incompris, que certains scientifiques étaient juges et partis, rappelant par ailleurs que 9 objections sur 19 avaient abouti à la révision des rapports et à la mise en place de 13 nouvelles conditions pour les pêcheries concernées. Mais attendez... si les auteurs de l'étude sont à la fois juges et partis, c'est qu'ils connaissent particulièrement bien les procédures et sont les plus à même de les critiquer, non? Or, des ONG comme Greenpeace et Bloom (co-auteurs) perdent rarement leur temps à dénoncer des dysfonctionnements sans fondement...].

 

Or, un échange avec une scientifique de la NOAA (National Oceanic and Atmospheric Administration - agence américaine responsable de l'étude de l'océan et de l'atmosphère) a révélé que le MSC venait récemment de labelliser plusieurs une pêcherie de Colin russe [MàJ 16/09/14] ... qui s'engage à respecter les critères du label, sans qu'aucune preuve ne puisse évidemment être apportée (*) - suivi et transparence russe oblige (on voit les dégâts avec la pêche illégale du crabe royal en Russie)... D'ici quelques temps, le consommateur devrait donc se retrouver à manger du colin russe pseudo labellisé dont il est impossible de vérifier le respect d'une pêche durable.

 

Pour le sérieux du MSC, on repassera. Fleury Michon n'est évidemment pas fautif, mais il convient désormais pour toute entreprise visant à être responsable de s'assurer que leurs fournisseurs puissent attester de leurs pratiques - et ne pas se contenter de la seule apposition d'un label. Cela semble être le cas avec le suivi américain du Colin (lire ci-après). Espérons que Fleury Michon ne sera pas tenté de sitôt à aller voir ailleurs, comme le fait déjà le groupe Iglo.

 

2. Suivi des stocks et gestion halieutique

Le colin d’Alaska (Theragra chalcogramma) vit dans le Pacifique Nord entre 100 et 300 m de profondeur. Il peut vivre 30 ans, atteignant sa maturité sexuelle vers 3-4 ans quand il mesure entre 20 et 50 cm (c'est l'âge à partir duquel il est pêché). Adulte, il peut mesurer jusqu’à 130 cm et peser 18 kg. Se répartissant en une douzaine de stocks distincts, ces derniers sont gérés par les administrations nationales (États-Unis, Japon, Russie, Corée du Nord), voire des commissions internationales quand les stocks chevauchent plusieurs eaux nationales. C'est la première espèce pêchée dans le monde, à raison d'environ 3 millions de tonnes par an ces dernières années contre 7 millions à la fin des années 80 - un déclin qui serait dû, entre autres facteurs, à la surexploitation de certains stocks (4).

 

Le colin reste toutefois régi par des quotas de pêche établis annuellement sur la base de recommandations scientifiques : l'ABC (Acceptable Biological Catch ou prises biologiques acceptables). Aux États-Unis, c'est ensuite le NPFMC (North Pacific Fishery Management Council) qui détermine le TAC (Total Allowable Catch ou total admissible de capture), en dessous ou égal à l'ABC. Si le TAC a chuté ces dernières années, il connait à nouveau une hausse (1,2 millions de tonnes en 2013, 1,75 en 2014 et 1,94 en 2015) (5).

 

Par ailleurs, des limites sont également fixées pour les prises accessoires (des espèces se retrouvant dans les filets bien que n'étant pas la cible des bateaux): les prises accidentelles de saumon notamment sont très contrôlées. Cet été, les prises trop importantes de calmars ont entraîné la fermeture de zones de pêche pour éviter d'atteindre les limites admissibles. Une fois celles-ci atteintes, toute la pêche au colin s'arrête pour la saison, que les pêcheurs aient ou non atteint le quota de colin. Enfin, ça, c'est pour la théorie. J'ai posé la question à des responsables de pêcheries: ils m'ont affirmé que ces limites n'avaient jamais été atteintes (donc, la pêche n'a jamais stoppé). Doit-on remercier des techniques de pêche ultra perfectionnées ou des limites trop élevées?

 

Il faut reconnaître cependant que le colin a la particularité de vivre en très larges bancs. De ce fait, aidé également par des filets adaptés laissant d'autres espèces s'échapper, 99% des prises sont du colin, ce qui évite un gâchis énorme (en moyenne, les prises accessoires sur le volume global
mondial pêché est de 8%, mais peut atteindre 95% pour les crevettes tropicales... une honte)(6). Nous l'avons vu sur le chalutier, sur deux chaluts remontés, le colin s'étalait à perte de vue, les autres espèces étaient très rares. D'ailleurs, les bancs de colin sont parfaitement reconnaissables sur les écrans de contrôle des chalutiers, comme en attestent ces captures d'écrans. Cela permet de jeter les filets au meilleur moment.

 

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Enfin, des zones ont été établies, où la pêche est strictement interdite, notamment une petite bande de quelques kilomètres le long des côtes, mais aussi des parcs nationaux et des réserves (accéder à la carte) qui servent de refuge à la vie sauvage, tout particulièrement les lions de mer.

 

3. Les méthodes de surveillance

Dès lors que des quotas sont fixés, le déclaratif ne suffit pas et des contrôles constants sont effectués par des observateurs fédéraux. Ce sont des scientifiques diplômés en biologie marine, recrutés par un petit groupe d'agences assermentées pour le compte de la NOAA (National Oceanic and Atmospheric Administration). Chaque bateau partant en mer embarque obligatoirement un observateur fédéral, présent tout au long de la remontée des filets.

 

Ce dernier prélève des échantillons de poissons (cf. photo de droite en tête d'article) qui sont pesés et mesurés et les prises accessoires sont répertoriées. Un observateur ne passe jamais plus d'une saison à bord d'un même bateau (2 saisons par an, de janvier à avril, puis de juin à octobre), pour éviter tout "copinage", la corruption étant par ailleurs lourdement condamnée. J'imagine déjà la tête de nos pêcheurs français si des observateurs étaient imposés systématiquement à bord!!!

 

Par la suite, un autre observateur est présent lorsque le poisson est débarqué à l'usine. Dans celle que nous avons visitée, les prises accessoires triées ensuite des tapis roulants atterrissaient dans des bacs dont le contenu était on ne peut plus visible de l'extérieur. N'importe quel observateur peut y jeter un coup d'oeil...

 

Des tableaux de suivi, bateau par bateau, espèce par espèce sont diffusés pour suivre l'état des prises quotidiennement. Chaque pêcherie peut donc gérer ses quotas et donner des directives à sa flotte qui sortirait de la moyenne, mettant en péril le reste de la saison. Franchement, sur cet aspect, c'est très certainement bien plus sérieux qu'en Europe.

 

4. Les impacts sur l'environnement

Est-ce vraiment durable de pêcher un million de tonnes de poisson chaque année (rien qu'aux US)? Nous pourrions croire que les quotas sont ajustés de manière à préserver la manne... Pourtant, certaines ONG ne l'entendent pas de cette oreille, Greenpeace en tête, mais aussi l'aquarium de Monterey (Californie), à l'origine de Seafood Watch, un des plus vastes programmes de sensibilisation à la pêche durable dans le monde.

 

Ainsi, si l'aquarium reconnaissait que le colin d'Alaska était généralement bien géré, des questions subsistaient sur l'état des populations (qui ont connu un déclin depuis 20 ans) et les impacts des chaluts. En effet, bien que les pêcheries n'utilisent dans la mer de Béring que des filets d'eaux moyennement profondes, il est estimé que ces chaluts touchent les fonds marins 44% du temps. Étonnamment, j'ai du recourir au cache de Google (permettant de rendre visible d'anciennes pages) pour retrouver ces données citées dans plusieurs articles parus en 2013, mais qui ont désormais disparu du site de Seafood Watch.

 

En raclant les fonds marins, les filets endommagent les éponges et les nombreux coraux d'eaux froides, d'autant plus fragiles que leur croissance est très lente (4 à 25 mm/an). En 2007 et 2012, Greenpeace a d'ailleurs mené plusieurs expéditions dans la mer de Béring, entre l’Alaska et la Russie, pour filmer les profondeurs et les canyons Zhemchug et Pribilof, les plus grands canyons sous-marins du monde. L'ONG a ainsi révélé l’existence d’une faune incroyablement diversifiée, qui reste extrêmement vulnérable face à la surpêche dans cette région du globe, comme le montre ce petit reportage de LinkTV.

 

 

L'ONG estime que 73 tonnes de coraux sont réduits en miette chaque année dans la mer de Béring et les Îles Aléoutiennes (7), proposant alors la mise en place d’une zone protégée autour de ces deux gros canyons pour servir de pépinière de jeune poissons et contribuer au repeuplement des fonds marins - sachant que seuls 4% des colins y sont pêchés. En avril dernier, l'ONG a été déboutée de sa demande. La NOAA estime que "des zones entières de ces grands canyons n'abritent quasiment pas de coraux tandis que de larges zones en dehors de ces périmètres en sont très riches. Si le but est de protéger ces habitats sensibles, il y a sans doute de meilleures façons de le faire que de fermer tout simplement l'accès de ces canyons à la pêche" (8). Si Greenpeace dit vrai, à savoir que seul 4% du colin y est pêché, cela semble plus subtile de protéger ces zones que recourir aux "meilleures solutions" de la NOAA que personne ne propose au demeurant pour l'instant...

 

Enfin, il persiste des inquiétudes sur le rôle de la pêche et le déclin des lions de mer de Steller, désormais très protégés, mais qui se nourrissent notamment de colin. De gros efforts ont été fait à ce niveau depuis 10 ans, avec la mise en place de zones interdites de pêche - mais des études plus poussées sont nécessaires pour comprendre toute la chaîne alimentaire et la façon dont la pêche peut impacter à différents échelons.

 

Et Fleury Michon dans tout cela?

Nous pourrons toujours argumenter sur les quantités pêchées, Fleury Michon n'est qu'un pion sur un échiquier où seul le consommateur joue en décidant de l'espèce qu'il consomme et en quelle quantité. A se plonger au coeur du monde de la pêche, tout n'est pas si simple. Du gâchis plus ou moins important selon les espèces à la surveillance du bon respect des quotas, des techniques utilisées à la transparence des données, il y a une hétérogénéité mondiale épouvantable et totalement opaque.

 

Échelle industrielle pour échelle industrielle, mieux vaut que l'entreprise s'en remette au Colin après tout. Quitte à manger du poisson, sans doute vaut-il mieux au final opter pour un poisson très surveillé, qui génère très peu de gâchis, à la condition qu'il soit pêché dans les eaux américaines et non russes (zéro confiance sur le suivi), en comptant sur la vigilance d'ONG comme Greenpeace pour identifier les zones les plus sensibles et faire pression pour les protéger.

 

Je rappelle qu'en 2010, la quantité de thon rouge de l'Atlantique Est négocié sur le marché mondial dépassait le quota légal de 141 % (9) et, d'une manière générale, les pêcheurs européens semblent incapables de respecter le moindre quota, quelles que soient les espèces. Ce n'est d'ailleurs qu'en 2013 que l'Union Européenne a pondu dans la douleur un accord contre la surpêche... qu'il reste à faire respecter.

 

Et si le consommateur commençait par devenir plus raisonnable sur les quantités qu'il absorbe, en acceptant d'y mettre le juste prix?

 

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Pour aller plus loin:
Un livre a vu le jour sur les enjeux de la pêche du Colin d'Alaska, je ne l'ai pas lu mais voici ses références: Kevin M. BAILEY (2013) "Billion-Dollar Fish: The Untold Story of Alaska Pollock", University Of Chicago Press, 288 p.

 

Sources:
(1) Guide des espèces 2013, Alliance Produits de la Mer
(2) Source: Association Bloom
(3) "A review of formal objections to Marine Stewardship Council fisheriescertifications", C. Christiana,  D. Ainleyb, M. Baileyc, P. Daytond, J. Hocevare, M. LeVinef, J. Nikoloyukg, C. Nouvianh, E. Velardei, R. Wernera, J. Jacquet, Biological Conservation 161 (2013) p.10-17
(4) Fiche espèce: le colin d'Alaska,
(5) Council motion – GOA Groundfish harvest specifications (pdf qui s'ouvre), NPFMC
(6) "Guide pour la réduction des prises accessoires dans la pêche au chalut des crevettes tropicales", FAO (2009)
(7) "Is it time for Bering Sea Canyon Marine Protected Areas yet?", Greenpeace (8 avril 2014)
(8) "Canyons, Corals, and Sustainable Fishing in the Bering Sea", NOAA (juin 2014)
(9) "Le thon rouge de Méditerranée souffre plus que jamais de surpêche et de fraudes", Notre Planète info (oct. 2011)
(*) [MàJ 16/09/14] Je cite, sur le communiqué de presse du MSC:"Lors de l'évaluation, l’organisme de certification a identifié huit plans d’actions que la pêcherie devra accomplir durant la période de certification et qui permettront notamment de renforcer son programme de surveillance et d'observation". On est donc bien dans les engagements. Pas des pratiques déjà en cours...

lundi, 18 août 2014

L'Oréal teste-t-il les cosmétiques sur les animaux?

cosmétique,test sur les animaux,santé,l'oréal,episkinOfficiellement, "L’Oréal ne teste plus aucun de ses produits ou ingrédients sur l’animal, et ce partout dans le monde. [Le groupe] ne délègue pas non plus cette tâche à d'autres. Une exception pourrait être tolérée si une autorité l’exige à des fins sécuritaires ou réglementaires"(1).

 

Relativisons. L'engagement respecte en ce sens les réglementations européennes, interdisant depuis 2004 tout test sur les animaux pour les produits finis, puis les tests pour les ingrédients en 2013 (2). Pourquoi tant de décalage entre les deux directives? Une des raisons invoquées a été de pouvoir proposer des méthodes alternatives de test répondant aux standards de l'ECVAM (European Centre for the Validation of Alternative Methods), organisme officiel créé en 2011. Gageons qu'entre 2004 et 2011, des troupeaux de lobbyistes ont du faire tout leur possible pour freiner les procédures.

 

Toujours est-il que L'Oréal a longtemps souffert d'une mauvaise presse en matière de tests sur les animaux... Or,  le groupe s'est préparé depuis longtemps pour tirer son épingle du jeu. Dès 1989, des protocoles d'évaluations dites "prédictives" étaient mis en place, permettant de ne plus tester les produits finis sur les animaux (soit 14 ans avant la Directive européenne). Restaient les ingrédients... en 2011, le groupe lançait le centre Episkin près de Lyon (ça tombe bien, c'est la même année que la création de l'ECVAM), une plateforme de recherche entièrement dédiée à la reconstruction de tissus humains pour évaluer la sécurité des substances appliquées. Ce n'est donc finalement qu'en 2013 que le groupe annonçait officiellement ne plus tester les ingrédients sur les animaux (ce qui implique l'engagement de près d'une centaine de filiales). Les mauvaises langues diront qu'ils se sont contentés de respecter la législation européenne qui entrait en vigueur cette même année... mais à leur décharge, l'engagement portait sur le monde entier, où cette réglementation ne s'appliquait pas.

 

Pour être transparente avec vous, j'ai été conviée à visiter Episkin fin mai (oui, je sais, je ne suis pas pressée pour écrire...) - fort intéressant je dois dire. Imaginez: 140 000 unités de tissus sont reconstruits par an (épiderme, derme, cornée oculaire...) à partir de déchets opératoires. D'autres centres ouvrent petit à petit dans le monde pour disposer de divers types de peau (peau asiatique, noire...), car leurs caractéristiques et leurs réactions diffèrent. Ces disques de tissus vivants servent à évaluer des milliers d'ingrédients. Je regrette cependant que ces derniers soient testés un par un, sur du court terme (impossible de mesurer les effets d'ingrédients sur plusieurs mois et encore moins un cocktail de produits) - un problème commun à tous les secteurs recourant à des produits chimiques, pas seulement les cosmétiques. Petite présentation d'Episkin:

 

Reportage (en anglais) tourné par la chaîne Bloomberg en 2011 sur Episkin

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Comment recréer l'épiderme: cliquez l'image pour l'agrandir (désolée, uniquement en anglais) (3)

 

Pas fou - les investissements représentent 30 millions d’euros par an, L'Oréal propose ces épidermes reconstitués à la vente (Bloomberg TV mentionne 55 euros le disque en 2011).

 

Au vu de l'infrastructure hyper protégée high tech, on peut légitimement se demander comment certaines entreprises procédaient avant 2013, voire 2004, qui affirmaient ne tester ni les ingrédients, ni les produits finis sur les animaux (Body shop racheté par L'Oréal en 2006, Yves Rocher, Weleda...). Mais... en creusant, il apparait très vite que l'opacité règne bien souvent, à la plus grande confusion des consommateurs.

 

Pour preuve, les listes de marques conseillées respectant les animaux varient d'une association à une autre. Yves Rocher est listé par l'association One Voice (voir la liste de produits labellisés garantissant qu’un produit n’a pas été testé sur les animaux) mais pas Body Shop. C'est exactement le contraire avec le label Humane Cosmetics Standard (HCS) de l'association Gaïa. Pratique!!! (mais plusieurs marques figurent dans les deux, à bon entendeur...).

 

Ne noircissons pas le tableau toutefois. Un groupe comme L'Oréal a d'énormes moyens financiers, certes... mais c'est une machine monstrueuse à mouvoir. J'ai pu constater avec plaisir que certains de ses représentants sont tout aussi motivés que vous et moi à vouloir bien faire. Mais là où au sein d'une PME, il suffit parfois d'un seul directeur de département montant au front pour transformer des process, ce n'est pas le cas dans une multinationale. Et rappelez-vous, le propre de toute entreprise est de combler les attentes du consommateur. A lui de faire pression car au final, c'est lui qui a le dernier mot... dans son panier d'achat.

 

Reste la dernière phrase de l'engagement de L'Oréal citée en tête d'article: "Une exception pourrait être tolérée si une autorité l’exige à des fins sécuritaires ou réglementaires". C'était le cas de la Chine, qui obligeait d'effectuer des tests sur des animaux pour des produits vendus sur son territoire. Le gouvernement vient tout juste de supprimer cette obligation cet été. Il n'est pas impossible que L'Oréal ait joué un rôle dans cette décision, mettant en avant sa technologie (voir à ce titre le reportage sur CCTV). Si influence il y a eu, seul un groupe avec une telle force de frappe pouvait réussir - les animaux chinois apprécieront et nous avec. Malheureusement, il n'est pas interdit que d'autres pays aient des exigences similaires...

 

Sites officiels: www.episkin.fr et son Centre d'évaluation prédictive: www.lorealpredictive.com

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Sources
(1) Site du groupe: Engagement de L'Oréal contre les tests sur les animaux
(2) Pour plus d'info, consulter la page dédiée sur le site de la Commission Européenne
(3) Source du diagramme: New Scientist

mardi, 12 août 2014

#VenezVerifier Fleury Michon : c'est fait!!!

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Durant 3 mois, j'ai participé en tant que blogueur à la campagne #VenezVerifier de Fleury Michon, visant à démontrer la qualité de son surimi (voir article "Fabrication du surimi: des additifs à la pêche durable"). Dans ce cadre, des blogueurs ont été conviés à observer tout le processus de fabrication, de la pêche du colin d'Alaska au produit final - l'entreprise faisant le pari osé d'ouvrir les portes de ses usines et d'embarquer quelques blogueurs (dont j'ai fait partie) à bord d'un chalutier. Premiers retours sur une aventure humaine extraordinaire.

 

Un groupe agroalimentaire qui ouvre ainsi ses portes, c'est à la fois passionnant et absolument exceptionnel (j'en sais quelque chose, le blog vient de fêter ses 9 ans d'existence). Or, cela tombait bien, j'avais constaté peu avant le lancement de la campagne qu'effectivement, le surimi de Fleury Michon n'avait aucune cochonnerie contrairement à la concurrence. J'ai donc tout de suite été prise au jeu d'en savoir plus. Après la visite d'usine en Vendée (fabrication du surimi à partir des pains de poissons), restait le principal: la pêche et la transformation du poisson en pains.

 

Si une trentaine de blogueurs étaient présents au démarrage, impossible financièrement d'emmener tout le monde sur un chalutier au beau milieu du Pacifique. Mais au fur et à mesure de l'avancée de la campagne, seule une petite quinzaine de blogueurs participaient au stage de survie en mer - étape obligatoire avant sélection finale (voir article "Tout va bien, je suis dans un radeau de survie!").

 

Au delà de passer le stage avec succès, le choix définitif des 6 blogueurs retenus a surtout reposé sur leur motivation et leur diversité: une blogueuse culinaire, un nutritionniste, 2 blogueuses famille/maman, un du marketing et moi de l'environnement. Pas de favoritisme en fonction d'éventuels kilos d'éloges, je suis la première à pouvoir l'attester!

 

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Nous sommes donc partis début juillet pour Seattle, point de chute où siège le Genuine Alaska Pollock Producers (GAPP) - l'organisme regroupant les pêcheries de Colin ("Pollock", en anglais). Puis direction Dutch Harbor en Alaska, principal port de pêche des États-Unis situé au milieu des Îles Aléoutiennes, entre le Pacifique et la mer de Bering (voir la carte). Nous avons passé une journée en mer sur un chalutier de la compagnie Trident Seafood pour assister aux remontées des filets et observer les conditions de pêche. Enfin, nous avons visité une des usines de transformation du poisson en pains congelés (celle d'UniSea), qui sont ensuite acheminés en Vendée pour fabriquer le surimi.

 

Je reste bluffée par l'opération de Fleury Michon. Évidemment, on trouvera toujours à redire, tout n'est pas rose quand on prélève des milliers de tonnes de poissons arrachés à la mer. Mais leur volonté de transparence doit être saluée. Ma seule présence en blogueuse environnement (sujet hautement plus sensible dans ce contexte que les thèmes culinaire, maman ou marketing) en sont une belle preuve.

 

Ces 8 jours d'aventure ont été tellement riches d'enseignement et de découvertes que je vais prendre un peu de temps pour rendre compte de mon analyse. Je vous donne donc rendez-vous à la rentrée. Restez à l'écoute!

mardi, 15 avril 2014

De retour des Terres de St Hilaire (1ère partie): l'agriculture raisonnée, pratique durable?

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Les Terres de Saint-Hilaire est un domaine viticole situé à une quarantaine de kilomètres d'Aix-en-Provence avec deux particularités: se vouloir plus respectueux de l'environnement et accueillir un Living Labs pour tester, notamment, des innovations technologiques dans les énergies renouvelables. J'ai visité ce lieu récemment avec Isabelle Guitton-Bernet, avocate et directrice d'Ecolex formation. Dans cette première partie, je laisse ma blogueuse invitée vous livrer ses impressions sur les pratiques viticoles du domaine. J'aborderai le Living labs la semaine prochaine.



« Se ressourcer, savourer, respirer… » est la devise de Sophie, son frère Philippe et Pierre Burel, père visionnaire, qui lègue cet immense domaine viticole en Provence s’étendant sur 1550 hectares de forêt, vergers et vignes. Le domaine propose également des logements (gites et chambres d’hôte), des espaces de réception, ainsi qu’un centre équestre, où les chevaux sont en semi-liberté.

 

Les cépages du domaine

Les vins des Terres de Saint-Hilaire (rouges, blancs et bien évidemment rosés) sont produits sur plus de 100 hectares de vignes. Après avoir beaucoup arraché de cabernet-sauvignon (rouge), peu utilisé dans l’appellation d’origine contrôlée Coteaux Varois en Provence dont fait partie le domaine, Philippe Burel et le maître de chai, Jean-Philippe Manzoni, ont fait le choix de replanter des cépages variés et exigeants : grenache, syrah, cinsault, carignan, mais aussi rolle et clairette, plus atypiques. Leurs objectifs : produire principalement du rosé et équilibrer les cépages en recherchant les parcelles les plus adaptées. En accord avec leurs objectifs, ils se sont inscrits dans une démarche "raisonnée".

 

Qu’est-ce que l’agriculture raisonnée ?

En France, l’agriculture raisonnée a son décret depuis 2002 qui nous livre la définition suivante : « Les modes de production raisonnés en agriculture consistent en la mise en œuvre, par l'exploitant agricole sur l'ensemble de son exploitation dans une approche globale de celle-ci, de moyens techniques et de pratiques agricoles conformes aux exigences du référentiel de l'agriculture raisonnée » (1).

 

Le référentiel en question comporte plus d’une centaine d’exigences nationales telles que:
- réaliser des analyses de sol
- assurer une diversité des cultures sur la superficie agricole utile de l'exploitation
- réaliser des observations sur l’état sanitaire des cultures, dans des parcelles représentatives de l’exploitation (contrôles visuels, piégeages…) en préalable à d’éventuels traitements.

Sur le domaine viticole, cela consiste notamment à compter les vers de la grappe pour éviter de réaliser un traitement insecticide non justifié.

 

Contrairement à l'agriculture biologique, l'agriculture raisonnée utilise les mêmes techniques et les mêmes produits que l'agriculture conventionnelle, y compris les produits chimiques de synthèse. Mais uniquement si cela s'avère nécessaire (2).

 

Un mode de culture qui ne fait pas l’unanimité

La critique récurrente de ce mode de culture est que le référentiel manquerait de rigueur et de précision : il serait trop général. La majorité des exigences du référentiel ne sont en effet qu’un rappel pur et simple de la loi.

 

Si le choix de l’agriculture raisonnée est fait par l'exploitant pour des raisons commerciales, de communication ou de contrôle des coûts, la protection de l’environnement ne sera évidemment qu’un prétexte et ce choix aura au final des effets limités pour la sauvegarde de la biodiversité. En revanche, si ce référentiel est appliqué par un agriculteur qui résonne "respect de la nature et du vivant", cet objectif sera atteint.

 

De ce fait, la seule certification "agriculture raisonnée" ne suffit pas. Il est fondamental pour l’amateur de vin soucieux de la protection de l’environnement et de sa santé, de connaître le viticulteur et la propriété. En clair: allez déguster ! Au-delà de la vérification indispensable de la qualité du vin, ce sera l’occasion de dialoguer avec le vigneron et de l’interroger sur ses motivations et sa vision par rapport à cette démarche environnementale.

 

Une démarche éco-responsable

L’accueil au domaine de Saint-Hilaire est chaleureux et Philippe Burel aime ses terres. Son exploitation est certifiée par le label Terra Vitis reconnu par le Ministère de l’agriculture comme étant une démarche bénéficiant de la certification environnementale (3).

 

Il fait un usage modéré des traitements chimiques. Il sélectionne les produits les moins dangereux pour la biodiversité et ne recourt avant la récolte qu'à des traitements biologiques. Son vin est analysé tous les ans et notre vigneron affirme qu'il ne présente aucune trace de pesticides. L'homme est curieux et entreprenant, il souhaiterait à terme s’initier à la biodynamie et à la permaculture. On le prend au mot, son vin est bon, nous reviendrons !

 

Cliquez pour en savoir plus sur la démarche durable du domaine.

Auteur: Isabelle GUITTON-BERNET
Crédit photo: Angélie BARAL

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(1) Décret n°2002-631 du 25 avril 2002 relatif à la qualification des exploitations agricoles au titre de l'agriculture raisonnée; Les exploitations sont auditées par des organismes certificateurs agréés par arrêté ministériel qui sont aujourd’hui au nombre de 14 (accédez à la liste et coordonnées).
(2)Pour aller plus loin, lire "L'agriculture raisonnée souhaite convaincre et être reconnue", Actu-Environnement (13/01/06)
(3) Conformément à l’article D617-3 du Code rural

lundi, 07 avril 2014

Fabrication du surimi : des additifs à la pêche durable?

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J’ai longtemps pensé que le surimi était un ersatz de poisson fabriqué à partir de résidus agrémentés de conservateurs, de colorants et autres joyeusetés artificielles. Optimiser ainsi des supposés restes n’était pas un problème, recourir à ces produits additifs, si.


Or, en février dernier, je me suis retrouvée au rayon des surimis où il me prit l’envie de lire les ingrédients. Je n’étais pas déçue, enchaînant les cumuls d’additifs dégueu jusqu’à ce que, surprise, je tombe sur une marque (Fleury Michon en l'occurence) où ne figuraient ni polyphosphate ou sorbitol (stabilisants), ni glutamate de sodium (exhausteur de goût), ni carmin (colorant naturel*). Effet wow garanti…


Le mois suivant, le hasard faisant bien les choses, voilà que cette même marque me contacte pour m’inviter à décrypter le processus de fabrication de son surimi. Mot d’ordre ? #VENEZVERIFIER, nom officiel de cette campagne visant à démontrer la qualité de sa production. Piquée au vif, j’ai accepté de relever le défi. [ndlr. Je rappelle que ce n'est pas un billet sponsorisé, mais bien la narration d’une expérience blogueur/marque où vous, lecteur, avez tout loisir d’intervenir au travers de vos commentaires].


Les additifs

Première action, forte de mon expérience au supermarché local : aller à la pêche aux ingrédients des bâtonnets de base d’un plus grand panel de concurrents. Le constat s’impose : Coraya, Cora, Auchan, Monoprix, Leclerc (produit par Fleury Michon**) comportent tous un cocktail de stabilisants (sorbitol E420 et/ou polyphosphates E452), du glutamate de sodium, voire un colorant dont on se passe (carmin plutôt que du paprika). Seules marques rescapées : des bâtonnets Carrefour (aussi produits par Fleury Michon) et Compagnie des pêches St Malo (dont certains ingrédients sont même issus de l’agriculture biologique). [N’hésitez pas à compléter en commentaire].


La pêche est-elle durable ?

Le surimi est composé de filets (et non de résidus) de poisson à chair blanche mixés (minimum 35% du produit fini selon la norme AFNOR en vigueur), auxquels sont ajoutés de la fécule, des blancs d’œuf, de l’huile végétale (Colza généralement) et des arômes. Il s’agit le plus souvent de colin d’Alaska – en l’occurrence, Fleury Michon recourt à 90% de colin et 10% de Merlu blanc du Pacifique (liens en anglais car beaucoup plus complets). On regrettera que sauf exception, aucune marque ne précise les espèces de poisson dans ses ingrédients [MàJ 12/04/14 : bonne nouvelle, cela va devenir obligatoire dans les prochains mois].

Plusieurs enseignes proposent des surimis dont le poisson est labellisé MSC (Marine Stewardship Council), c'est-à-dire considéré comme ayant été pêché durablement, sans mettre les stocks en danger. C’est le cas pour Fleury Michon (mais aussi pour Coraya notamment).

Or, rien qu’en France, 60.000 tonnes de surimi sont consommés par an (la marque occupant 25% de ce marché). Mondialement, les quantités font donc frémir et plusieurs ONG (Greenpeace en tête) réclament de réviser les statuts du Colin et du Merlu – qui ne sont actuellement pas considérés en danger.

Cette question de la quantité est au cœur même de nos modes de consommation dont le consommateur est le premier acteur. Car oui, cela peut faire figure de lapalissade… mais c’est toujours le consommateur qui peut tuer une marque et non le contraire. Comme je le dis toujours, aucune goutte de pluie ne se sent responsable des inondations.

Étape n°1: des bons points...

Je reconnais que Fleury Michon a fait effectivement un gros effort sur ses produits au regard de la concurrence (pour un prix à peine plus cher). L’exploration se poursuit (décryptage des modes de pêche, des arômes ajoutés…) et si la marque continue à jouer le jeu, même si tout n’est pas parfait, nous pourrons alors saluer sa volonté de transparence. Je vous tiens bien évidemment au courant ;-)

D’ici là, je vous invite à me faire part de vos interrogations/critiques/remarques dans les commentaires.

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* Le carmin est un colorant produit à partir de cochenille, un insecte vivant sur des cactus surtout cultivés en Amérique latine. Diverses étapes sont nécessaires pour obtenir le colorant, avec parfois un traitement aux sels d’aluminium. Colorant potentiellement allergisant. Plus d'info sur ce site. Sincèrement, quand on sait qu'on peut obtenir la même coloration de surimi avec du paprika...
** Pour info, nombre de grands fabricants fournissent les marques distributeurs - avec l'obligation de répondre au cahier des charges de ces derniers, d'où des différences de recettes. Concernant Leclerc, il semblerait que certains additifs comme le polyphosphate viennent d'être supprimés. Info non vérifiée.

lundi, 10 février 2014

Projet LeCHE : aux origines de l'intolérance au lactose de l'Homme

intolerance au lactose,recherche,alimentation,consommation,histoireDurant 4 ans, le projet européen LeCHE (Lactase Persistence and the Cultural History of Europe) a réuni archéologues,  chimistes et généticiens de 13 équipes de recherche de 7 pays d’Europe. Objectif : comprendre la genèse de l’élevage laitier au Néolithique en Europe et au Proche-Orient et analyser l’évolution de la capacité humaine à digérer le lait à l’âge adulte. Les résultats viennent d’être publiés.

 

A l’aube du Néolithique (-12 000 ans), l’agriculture apparaît, supplantant le nomadisme fait de chasse et de cueillette. Rapidement, l’élevage à fin de production laitière prend son essor il y a 10 000 ans (4000 ans plus tôt que prévu), avec même des traces de production de fromage en Pologne il y a déjà 7000 ans. C’est à cette période également que des mutations génétiques commencent à apparaître chez certaines franges de la population, permettant soudainement de digérer le lactose à l’âge adulte, grâce à la production d’une enzyme, la lactase.

 

Ces résultats ont été rendus possible au travers notamment de l’analyse des restes lipidiques dans les tessons de poterie, l’étude des ossements d’animaux (âges d'abattage, répartition, régime végétal différant des animaux sauvages) et l’analyse génétique de populations humaines suivant leur tolérance au lactose. Ces travaux ont mis en évidence une régionalisation des productions, plus ou moins importante suivant les territoires.

 

Or, il s’avère que les populations du Néolithique ont connu un important accroissement démographique traditionnellement attribué à une plus grande fertilité des femmes. Mais l’accès à des produits laitiers pourrait bien avoir contribué à cette augmentation.

 

Pour rappel, si tous les bébés assimilent le lait, cette capacité disparait chez l’adulte – sauf à disposer d’une mutation génétique permettant de produire la lactase, l’enzyme nécessaire à la digestion de lactose présent dans le lait. De ce fait, cette adaptation semble conférer un avantage certain, donnant accès à une nouvelle source nutritive bien utile en cas de pénurie alimentaire.

 

La présence de cette mutation dans les populations varie suivant les régions, proche de 90 à 100% en Europe du Nord (mais aussi chez des tribus africaines et bédouines) contre moins de 30 % dans certaines zones méditerranéennes (où la tendance est plus à la consommation de fromage, ne contenant presque plus de lactose). Cette régionalisation semble étroitement corrélée aux pressions de sélection de certains territoires où l’expression de cette mutation a conféré un environnement favorable au développement de sociétés humaines.

 

Dans un contexte polémique où une levée de boucliers grandissante critique vertement la culpabilité infligée par les industriels de ne pas consommer de lait – rappelant que l’adulte n’a pas été biologiquement conçu à le digérer, ce projet indique que cela fait tout de même près de 500 générations que nombre de nos ancêtres en consomment, grâce à une mutation génétique qui a semblé bénéfique à l’essor de certaines sociétés.

 

Cela n’enlève rien au questionnement éthique que nous devons avoir des sélections qui ont été opérées sur les animaux d’élevage, désormais considérablement fragilisés, qui se voient administrer quantité d’hormones et de médicaments dans des conditions de vie indignes. Gageons que notre évolution ne dépend plus de notre consommation de lait quand bien d’autres alternatives toutes aussi nutritives sont à notre disposition…

 

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Pour aller plus loin:
Site du programme européen LeCHe
Dossier de presse présentant l'équipe et les résultats en détail (pdf, 24 p.)

mardi, 07 janvier 2014

2014: On prend les mêmes (défauts) et on recommence?

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30 ans que j'ai commencé à être initiée aux problèmes environnementaux par mes parents, notamment mon père, architecte urbaniste, qui a passé sa vie dans les pays émergents. Mon enfance m'a fait aller à la rencontre des pays les plus pauvres de la planète, comme des plus riches et insouciants, à cultiver des tomates en plein désert. Élevée à profondément aimer cette Terre, j'ai entamé des études d'écologie il y a 18 ans, qui m'ont conduite à l'environnement et au développement durable.

 

Les optimistes s'évertuent à me démontrer que le monde évolue et prend conscience petit à petit des choses. La méthode Coué, c'est sympa mais on s'en lasse. La consommation matérielle n'a jamais été aussi forte (désormais preuve de réussite dans les pays émergents) et le peuple n'a que la crise du pouvoir d'achat à la bouche. A côté de gens prêts à moins posséder, il n'y a jamais eu autant de riches qui n'en ont rien à foutre. Ceux-là, les écolos qui veulent me faire voir la vie en rose les oublient. Le monde des bisounours, ça fait longtemps que je l'ai quitté...

 

Je me sens comme ces guépards, témoins de cette route qui saigne la forêt, impuissants. Je vois les années défiler avec la répétition inlassable des mêmes conneries. De nos gouvernements incapables à l'égoïsme répété de l'être humain pris dans sa globalité et je suis fatiguée. Ras-le-bol de s'en prendre plein la tronche à vouloir changer le monde parce qu'on voit le précipice au bout de la route. De toutes les façons, la planète s'en remettra (après quelques millions d'années...), c'est juste triste de se dire que les humains qui disparaîtront après un long calvaire inutile ne sont pas les responsables.

 

Je songe donc sérieusement à me reconvertir. Blogueuse francilienne cherche sculpteur (bois/métal) prêt à initier la jeune padawan que je suis (annonce sérieuse au fait...).

 

Ce sera peut-être bien là ma résolution 2014.