lundi, 23 janvier 2012
Quand la médecine du travail rejette 3 millions d'actifs
Ils sont 3 millions d'actifs sur les 28 millions que compte la France, soit 10,5% des actifs délaissés par la médecine de travail, qui ne bénéfient d'une protection qu'au prix fort, sans aucune surveillance, sans suivi. Exit les visites obligatoires, la prévention, les conseils, le soutien psychologique et... bien sûr, on oubliera les arrêts.
Eux? Ce sont les 3 millions de dirigeants, pour l'essentiel des petits patrons de TPE constituant plus de 95% des entreprises en France...
Pourtant en tant qu'employeur, dès que vous embauchez, la médecine du travail vous saute dessus pour que vous cotisiez. Je trouverais cela normal si ce n'est que quelle que soit la date d'embauche, vous payez plein pot pour l'année en cours (comme ces 12 mois de cotisation pour 2 mois effectifs, en vous affirmant qu'on vous a emailé des convocations jamais reçues - donc zéro travail effectué - véridique). Par contre, le jour où un nouveau salarié signe un contrat puis se met en arrêt maladie, vous n'avez que vos yeux pour pleurer... et personne ne vient contrôler quoi que ce soit.
Tout cela, c'est du vécu. Le stress engendré aussi. Mais là, pas de visite obligatoire, l'Etat n'a institué aucune formalité pour s'assurer du bien-être des dirigeants et suivre leur état de santé. Or, l'employeur qui dirige a bien du mal à admettre d'éventuels problèmes de santé et surtout, à les faire connaître. Voilà bien un sujet tabou dans une France qui surmédiatise le suicide des salariés dans l'entreprise (un mal-être ne doit jamais être négligé, mais je vous invite à lire l'analyse sur le taux réel de suicides chez France Telecom).
Olivier Torrès, qui a créer Amarok, l'observatoire de la santé des dirigeants de PME, parle d'ailleurs des 3D: dépression, dépôt de bilan, divorce, auxquels s'ajoute parfois un quatrième, le décès. Des fois, je me dis qu'il faut être bien maso en France pour devenir entrepreneur: pas de filet (exit les indemnités chômage ou arrêt maladie), pas de santé sans payer le prix fort, pas le droit de louer (vous ne présentez pas les garanties d'un salaire)... bref, juste le droit d'être libre de votre emploi du temps, de ne plus subir de pression hiérarchique et d'être gratifié directement par votre travail. Je n'ai jamais regretté d'avoir créé mon entreprise (et d'être associée dans une autre). Mais je me dis tout de même que la note est sacrément salée en France.
La crise touche AUSSI de plein fouet les entrepreneurs. J'en connais qui sont tombés et en souffrent en silence. Mais pour eux, il n'y a pas de médecine du travail. Que vaut une nation si elle s'accorde sur la nécessité de protéger la santé des salariés mais pas de ceux qui les encadrent et les dirigent? Non, la plupart des patrons ne sont pas le diable et le bien-être social est une des clés essentielles du développement durable. Il serait temps d'en prendre conscience.
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Sources:
- "28 millions d'actifs en France", site d'Emploi pro (18 janv. 2010)
- "La santé du dirigeant, premier capital de la PME", L'Entreprise (29 avril 2010)
- Amarok, observatoire de la santé des dirigeants de PME, commerçants et artisans
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mercredi, 04 janvier 2012
Résolution 2012: positiver?
Et si nous décidions cette année de positiver? Oui le monde, l'euro, le chômage, la dette... sont en crise. Oui l'environnement va mal, très mal, notre santé en empatit, les citoyens ont du mal à changer leurs habitudes, la gouvernance met un temps fou à légiférer et les industriels traînent de la patte. Ah oui. Et puis c'est aussi supposé être la fin du monde. Ajoutez à cela un temps de ch*** sur une bonne partie de la France et voilà de quoi s'abonner définitivement aux cures de prozac.
Et si nous faisions plutôt le choix de positiver? Après tout, il y a des filières où le chômage est minime, des sociétés qui connaissent un bel essor et à regarder de très près, un nombre croissant d'entreprises s'investissent dans des projets de développement durable de plus en plus poussés - preuve que l'éveil des consciences prend de l'ampleur. Je vous parlerai d'ailleurs dans les prochaines semaines de Carrefour, Danone et Accor, entre autres, mais aussi de jeunes entrepreneurs très prometteurs.
Oui, tout n'est pas rose. Mais il serait temps de valoriser les actions qui font du bien à la planète, qui engendre un progrès social tout en répondant à des modèles économiques viables. C'est aux médias d'aller chercher cette info, de la mettre en avant pour servir de moteur au changement. Il ne s'agit pas de faire l'autruche, mais de se booster tout simplement le moral, c'est ainsi que l'on avance!
Cette philosophie a toujours été au coeur de ce blog mais, parfois, je me sens bien seule. Je compte donc sur vous pour semer la bonne humeur autour de vous. Bonne année 2012!
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jeudi, 24 novembre 2011
En réponse au fanatisme de Pascal Bruckner
Extrait de ma chronique sur le site de l'Express...
Dans son dernier essai, Le Fanatisme de l'Apocalypse, Pascal Bruckner s'attaque à un supposé fanatisme écologique, devenu selon lui majoritaire, anti-humaniste, prônant la disparition de l'homme pour le bien-être de la nature. Mais le plus insensible à la préservation de l'humanité est-il vraiment l'accusé?
Ce présupposé fanatisme écolo est le seul qui place systématiquement l'homme au coeur de ses préoccupations. Des futurs réfugiés climatiques aux peuples dépérissant dans ces nouveaux déserts où les cultures de coton ont abusivement pompé toute l'eau, de ces enfants dont les taux d'asthmatiques s'envolent face à la multiplicité des polluants aériens à ceux condamnés à éplucher des piles et des ordinateurs à l'autre bout du monde, la prise en compte du bien-être humain est omniprésente.
De toutes les citations dont Bruckner nous abreuve pour justifier sa soif de préserver son mode de vie intacte (c'est bien connu, l'enfer, c'est les autres), il en a oublié une, cruciale: l'homme est un loup pour l'homme. Ainsi, la réalité quotidienne de l'immense majorité de ces horribles fanatiques écolos est d'être le témoin d'un nombre inimaginable d'abus étroitement corrélés avec l'altération, voire la destruction de l'environnement impactant directement sur notre bien-être. La santé dans nos assiettes, les polluants dans l'air que nous respirons, la déforestation condamnant des peuples à disparaitre... Je défie quiconque de me dire qu'à défendre la planète, on ne s'attaque pas à la souffrance de l'humanité.
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mercredi, 02 novembre 2011
Sauvegarder le savoir indigène en Amazonie
Suite à ma rencontre avec deux leaders indigènes brésiliens (lire "Le génocide silencieux des indigènes - Rencontre avec Haru et Ninawa"), j'avais promis de vous parler du projet d'Haru, qui souhaite créer un centre de recuperation des savoirs indigènes du peuple Pano.
Le contexte
Le peuple Kuntanawa, tout comme les nombreux autres peuples autochtones, vivait en harmonie avec la forêt jusqu'à la fièvre du caoutchoux en 1880 où des travailleurs du nord-est du Brésil envahirent en masse les territoires indigènes. Le conflit généré entraina la capture et l'asservissement de nombreux autochtones et ceux qui refusaient furent décimés. Les autres se sont vus interdire de parler leur langue, de perpétuer leurs coutumes, leurs croyances et leurs traditions. Ce peuple n'avait aucune existence officielle car le gouvernement considérait qu'il avait été exterminé.
Pourtant, le peuple Kuntanawa rassemble encore plusieurs centaines d'invididus et des milliers d'indigènes subsistent en Amazonie. Il est encore temps de rassembler les connaissances, les croyances et les savoirs traditionnels, dispersées parmis les anciens, pour l'enseigner aux enfants et renforcer leur identité en leur permettant de retrouver les racines de leur peuple tout en vivant en profonde harmonie avec la nature (en savoir plus sur le peuple Kuntanawa - site d'où la photo est extraite).
Le projet
Pour y parvenir, le projet consiste à construire une école traditionnelle pour les enfants, les jeunes et les adolescents (environ une centaine par an). Dotée d'une salle informatique et d'une bibliothèque, elle facilitera la recherche et centralisera les connaissances autochtones. Plusieurs activités sont prévues:
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jeudi, 27 octobre 2011
Le génocide silencieux des indigènes - Rencontre avec Haru et Ninawa
Génocide: extermination physique, intentionnelle, systématique et programmée d'un groupe ou d'une partie d'un groupe en raison de ses origines ethniques, religieuses ou sociales.
Moment exceptionnel et bouleversant qu'une rencontre avec Haru (ci-contre), leader politique et chef du peuple Kuntanawa et Ninawa (en bas à droite), leader spirituel de la tribu Kaxinawa dans la région de l'Acre, au nord du Brésil. Après s'être vu par le passé interdire de parler leurs langues et pratiquer leurs rituels, voyant leurs forêts rognées et saccagées, ces peuples ont voulu se réapproprier leurs cultures, souhaitant désormais faire reconnaître le savoir indigène, préserver leur identité et acquérir une autonomie – tout en sauvant la forêt et par là même, leur territoire.
Or, plus de 70% du peuple Kashinawa sont morts au contact des blancs et le savoir est désormais dispersé d'une tribu à l'autre. Il devient à présent crucial de collecter les connaissances préservées chez les uns et les autres pour recomposer le tableau complet. Pour y parvenir, Haru a lancé le mouvement "Corredor Pano" (le Pano est la langue d'usage), luttant pour la préservation et la promotion de la culture indigène, qui réunit désormais 13 tribus brésiliennes constituant environ 90% des quelques 20.000 indigènes de la région de l'Acre. L'objectif est d'étendre le mouvement aux 40 000 indigènes brésiliens, péruviens et boliviens, disséminées sur une surface de près de 100 millions d’hectares.
40.000… Soudainement, cela ressemble fort au combat de David contre Goliath… L'Etat du Brésil n'a en effet aucun intérêt à se montrer favorable à leur requête car la forêt représente une manne financière à court terme – les peuples indigènes étant perçus comme des gêneurs freinant leurs aspirations économiques.
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vendredi, 21 octobre 2011
J-226 avant Rio + 20
Par mon blogueur invité, Romain Laventure, juriste en environnement
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On l’oublie souvent, mais les questions écologiques ont été placées au rang de préoccupations internationales dès 1972 lors de la "Déclaration de Stockholm", puis celle de Nairobi en 1982. Mais ce n’est vraiment qu’en 1992 que le cri d’alarme retentit avec la Déclaration de Rio, lors de la Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement (CNUED), plus connue sous le nom de "Sommet de la Terre".
En 2002, soit 10 ans plus tard à Johannesburg, Jacques Chirac, alors Président de la République, commença ses propos par "Notre maison brûle et nous regardons ailleurs". Il y faisait déjà le double constat de la destruction de la nature et de l’indifférence générale dans laquelle tout cela se produisait, alors que les catastrophes pourraient mettre en danger l’existence même de toute vie sur Terre.
Et 20 ans plus tard ?
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mardi, 11 octobre 2011
Les Bishnoïs (2ème partie): lutter contre le plastique
Khamu Ram collectant les plastiques, images extraites du
documentaire "Rajasthan, l'âme d'un prophète" - F. Vogel et B. Ségur
Suite de l'article "Les Bishnoïs (1ère partie): 525 ans d'éveil à l'écologie"
Comme je vous le décrivais hier, le respect de la nature, qu'il s'agisse de l'arbre ou de l'animal, est au coeur même de la philosophie et du mode de vie de la communauté Bishnoï - un engagement qui a marqué à jamais l'histoire indienne.
C'est en 1730 en effet que le Maharadjah de Jodhpur, qui souhaitait faire construire un nouveau palais, envoya une armée pour abattre les arbres des forêts avoisinantes. Or, celles-ci appartenaient aux Bishnoïs et, suivant leurs 29 préceptes (voir 1ère partie), il était interdit de les couper. L'une des villageoises, Amrita Devi, décida donc de s'enlacer au tronc et fut décapitée. Mais ses filles l'imitèrent, puis son mari et des habitants de villages alentours car ils pensaient que l'armée finirait par abandonner. 363 Bishnoïs périrent ainsi jusqu'à ce que le Maharadjah mit fin au carnage. Pour honorer leur courage, les terres des Bishnoïs devinrent sacrées et désormais, nul étranger à leur religion ne doit enfreindre les 29 règles.
Mais près de 300 ans plus tard, les Bishnoïs peinent à respecter la nature comme ils le voudraient. La menace arrive directement de nos sociétés de consommation (comme d'habitude...) et un mot résume à lui seul le fléau qui les accompagnent: le plastique.
Des morceaux de plastique envahissent les terres des Bishnoïs, s'accrochant aux arbres et jonchant le sol... Un homme, perçu comme exentrique par sa propre communauté, a pourtant décidé de lutter: Khamu Ram Bishnoï. Entre collecte du plastique et éducation de la population, sa détermination voit naître un nombre grandissant de soutiens. C'est ainsi qu'il a été amené à rencontrer la romancière Irène Frain et le photographe Franck Vogel. Tout a commencé par une expo photo dans le métro à Montparnasse (Paris), puis un documentaire (voir la 1ère partie de l'article) et un livre "La forêt des 29". Désormais, Franck prépare un projet de recyclage du plastique, inexistant dans cette région de l'Inde, pour transformer le plastique collecté. Une nouvelle expo photo est prévue à la station Luxembourg (Paris) courant novembre. Je tâche de vous tenir au courant!
Et savez-vous comment ce plastique est récupéré? Grâce à des poubelles en jute, montée sur des cerceaux métalliques (voir photo ci-dessus). Toute ressemblance avec nos poubelles de métro est normal... c'est en venant à Paris lors de l'inauguration de l'expo photo que Khamu Ram les a découvertes, reproduisant ainsi un modèle similaire très simple à mettre en place - en remplaçant le sac plastique par une toile de jute, nettement plus écolo.
Comme quoi, le Nord peut aider le Sud de la manière la plus inattendue possible... il ne reste plus qu'à s'inspirer des préceptes Bishnoïs dans nos modes de vie.
Irène Frain, Khamu Ram Bishnoï et Franck Vogel aux Ateliers de la Terre.
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